Le comportement alimentaire selon l’approche bio-psycho-sensorielle

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Dans cet article, je présente l’approche bio-psycho-sensorielle, élaborée par les Dr ZERMATI et APFELDORFER. À ce jour, leur modélisation du comportement alimentaire est celle que je trouve la plus pertinente, aussi bien sur le plan théorique que d’un point de vu pratique lorsque j’accompagne mes patient.e.s à retrouver une relation sereine avec l’alimentation.

Qu’est-ce que le comportement alimentaire ?

Le comportement alimentaire est un terme assez vaste qui désigne l’ensemble des attitudes ou conduites d’une personne vis-à-vis de la consommation d’aliments, avant, pendant et après l’acte alimentaire (l’action isolée d’ingestion des aliments).

Le terme « comportement » ainsi que le terme « conduite » évoquent littéralement les actes, les gestes…ce qui peut être trompeur. En effet , la relation qu’un individu entretient avec l’alimentation ne se limite absolument pas aux comportements qu’il adopte.

Le comportement alimentaire

L’être humain s’alimente sans ne jamais être dissocié de ses événements psychologiques :

– ses cognitions (pensées, croyances, idées, intentions…)

– ses émotions (expérience psychologique et corporelle en réaction à un événement extérieur).

Ainsi, pour ma part lorsque j’utilise le terme de comportement alimentaire, je considère toujours les interactions qui ont constamment lieu entre les comportements, les cognitions et les émotions.

C’est pour cette raison que la diététique comportementale intègre de nombreuses notions de psychologie, sans lesquelles cette discipline ne pourrait ni expliquer le fonctionnement du comportement alimentaire, ni en traiter les différents dysfonctionnements qui peuvent survenir au cours de la vie. 

C’est également pour cette raison qu’un plan alimentaire ne peut pas, à lui seul, améliorer de façon pérenne la relation d’un individu à l’alimentation, puisque le plan alimentaire n’agit que sur le plan comportemental.

Comportement alimentaire fonctionnel (ou régulé) VS dysfonctionnel (ou dérégulé).

Lorsqu’une personne a une relation sereine à l’alimentation, et qu’elle couvre spontanément ses différents besoins alimentaires, je parle de comportement alimentaire régulé, ou bien de comportement alimentaire fonctionnel.

A l’inverse, je parle de comportement alimentaire dérégulé ou bien dysfonctionnel lorsqu’une personne ne répond pas à tout ou partie de ses besoins alimentaires spontanément et sereinement. Il existe différentes dérégulations du comportement alimentaire, qui sont développées par la suite.

En cas de TCA ou d’alimentation troublée, il existe bien souvent plusieurs dérégulations distinctes, survenues plus ou moins conjointement, ou alors certaines ont pu en engendrer d’autres.

Chez une personne au comportement alimentaire régulé, on observe classiquement :

CognitionsEmotionsSensations

Période pré-prandiale (avant la prise alimentaire)

intérêt croissant pour les aliments
excitation ou joie à l’idée de manger, irritabilité et impatience si la faim et/ou l’envie sont importantes

augmentation des sensations de faim

Période prandiale (pendant la prise alimentaire)
diminution progressive de l’intérêt pour les aliments
diminution progressive du plaisir à manger
diminution progressive des sensations de faim ; diminution de la vitesse d’ingestion

Période post-prandiale (après la prise alimentaire)
absence d’intérêt à manger ; absence de pensées au sujet des alimentsneutralité émotionnelle vis-à-vis de l’alimentation ou bien état de satisfaction
état de satiété (absence de faim) associé à un confort digestif

Les fonctions du comportement alimentaire selon l’approche bio-psycho-sensorielle.

Selon l’approche bio-psycho-sensorielle, le comportement alimentaire est censé assurer certaines fonctions. C’est pour cela qu’il peut être fonctionnel ou dysfonctionnel.

Le comportement alimentaire a principalement 3 fonctions :

  • La première est la fonction énergétique, par l’apport de calories issues de l’utilisation de 3 nutriments : les glucides essentiellement, les lipides et les protéines. Le glucose (petite molécule du groupe des glucides) est le substrat préférentiel pour la majorité des cellules du corps, et il est absolument vital pour certaines cellules spécifiques comme les neurones.
  • La deuxième est la fonction nutritionnelle, parce que les cellules et donc les organes ont besoin d’autres nutriments que le glucose pour fonctionner de façon optimale : d’autres oses (comme le fructose), différents lipides (oméga 9, 6, 3 etc.), différents acides aminés (issus de la dégradation des protéines), des vitamines, des minéraux (magnésium, fer etc.) et des oligo-éléments (iode, zinc etc.)
  • La troisième est la fonction émotionnelle, car de tout temps le comportement alimentaire a été associé au plaisir : plaisir de cuisiner pour soi, pour les autres, plaisir de savourer, plaisir de partager un repas etc. ainsi qu’à la régulation de certaines émotions désagréables (la tristesse, l’angoisse…).

Il est vital que le comportement alimentaire assure les 2 premières fonctions évoquées, car l’ingestion des aliments est la seule façon pour l’être humain d’obtenir les nutriments essentiels à la compensations des dépenses énergétiques au quotidien, nutriments qui sont également essentiels au maintien de la composition corporelle (les masses osseuse, hydrique, graisseuse et musculaire doivent rester stables à l’âge adulte).

De par ce caractère vital, il est essentiel que différents mécanismes indépendants de la volonté régissent la couverture des besoins, énergétiques dans un premier temps, et nutritionnels dans un second temps.

La fonction émotionnelle du comportement alimentaire n’est pas vitale, elle semble cependant nécessaire à l’épanouissement global de l’individu d’un point de vue individuel et social.

L’ensemble du comportement alimentaire est donc finement régulé, c’est-à-dire qu’il est contrôlé par des mécanismes déclencheurs et des mécanismes inhibiteurs qui s’activent selon les besoins énergétiques, nutritionnels et émotionnels.

Cette régulation est physiologique (tous les humains naissent avec cette capacité) et involontaire (elle est indépendante du contrôle mental volontaire).

Chaque fonction alimentaire dispose de son propre mécanisme de régulation : 

1. La fonction énergétique est régulée par la faim (le déclencheur, exprimant un besoin énergétique) et la satiété (l’inhibiteur, exprimant la fin du besoin énergétique).

2. La fonction nutritionnelle est régulée par l’appétit spécifique (le déclencheur, exprimant un besoin nutritionnel, par exemple en fer) et le rassasiement sensoriel spécifique (l’inhibiteur, exprimant la fin du besoin nutritionnel).

3. La fonction émotionnelle est régulée par la recherche d’un confort émotionnel accru (le déclencheur, exprimant un besoin émotionnel) et l’obtention de ce confort (l’inhibiteur, exprimant la fin du besoin émotionnel).

Les différentes dérégulations du comportement alimentaire.

Les dérégulations du comportement alimentaire peuvent toucher les 3 mécanismes de régulation. Voici les dérégulations les plus fréquemment observées chez les personnes sujettes aux troubles alimentaires :

Dérégulations fréquentes
Système énergétiqueAbsence totale de ressenti de la faim et/ou de la satiété ; Diminution de la perception de la faim et/ou de la satiété ; Confusion des sensations de faim et/ou de satiété avec d’autres sensations (soif, fatigue, émotions, digestion…) ; Utilisation de la faim comme un marqueur de réussite.
Système nutritionnelAbsence totale ou partielle de l’identification des appétits spécifiques ; Absence totale ou partielle de l’identification du rassasiement sensoriel spécifique ; Envies alimentaires essentiellement tournées vers les aliments interdits ou mal connotés, plutôt que vers les aliments contenant des nutriments nécessaires au fonctionnement optimal de l’organisme ; Rassasiement tardif ou absent après consommation des aliments interdits ou mal connotés.
Système émotionnelPrises alimentaires émotionnelles fréquentes et/ou impliquant la consommation de quantités importantes ; Prises alimentaires émotionnelles n’aboutissant pas systématiquement à un meilleur confort émotionnel ; Prises alimentaires émotionnelles parfois ou souvent automatiques.

Conclusion

Comprendre le fonctionnement optimal du comportement alimentaire permet d’augmenter la connaissance de soi et surtout la confiance dans la capacité de son propre corps à se réguler de lui-même. Ce dernier point est important, car c’est grâce à cette confiance grandissante dans son propre corps et dans sa capacité de s’auto-réguler, qu’il devient envisageable de se détacher du contrôle de son alimentation.

De plus, il vous sera certainement très utile de comprendre quelles sont les dérégulations du comportement alimentaire qui vous concernent, cela pourra vous aider à identifier vos “axes de travail” pour tendre progressivement vers un comportement alimentaire régulé et serein.
Pour cela, je vous invite à lister toutes les problématiques alimentaires que vous observez, pourquoi pas en faisant des liens avec les dérégulations listées dans le dernier tableau.

J’espère que cet article vous est utile !

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