Voici un témoignage rédigé par une personne que j’ai accompagnée durant quelques mois en 2020. Bonne lecture !
» Mon corps et moi c’est une de ces histoires basiques de jeune fille née dans les années 90 entourée de magazines valorisant les régimes miracles, les corps athlétiques et sans aucune véritable représentation de la diversité. A cette époque, le « gros », on le chasse, on le juge, on le dénigre, on lui associe toutes les causes de maladies et… souvent violemment…
Mon parcours est assez similaire à beaucoup d’autres jeunes filles ayant déjà une nature un peu forte, un peu carrée, aimant bien manger et ayant sans (aucun) doute une « légère émotivité ».
Depuis l’adolescence, mon corps et moi c’est un « je t’aime moi non plus » permanent rythmé par des prises de poids (de 10 à 15 kg en moyenne) reliées à des périodes de ma vie plus compliquées que d’autres mais avec le point commun d’une hyper émotion sur une longue période (études, examen, problèmes familiaux…).
J’ai fini par grandir en devenant la fameuse « copine un peu grosse », celle qu’on aime bien, qui est toujours là pour les autres et toujours prête à rigoler mais par forcément celle qu’on fantasme.
Et puis vient ce moment des « sonnettes d’alarme », souvent venant des deux mêmes personnes : mes parents. Alors même si je pense qu’ils ont, parfois, été très maladroits dans leurs manières de me faire remarquer ma prise de poids, j’ai toujours su qu’au fond ce n’était qu’amour profond à m’aider à me sentir mieux. Car oui dans ces moments, je ne me sentais clairement pas bien. Dégout de moi-même, perte de confiance en moi, compensation émotive dans la nourriture en mangeant beaucoup (histoire de combler un mal-être). Et puis le cercle vicieux, plus on mange, plus on grossit.
Toutefois, je préfère dédramatiser un peu cette histoire, car j’ai eu la chance d’être toujours bien entourée, famillialement et amicalement donc je préfère préciser que j’étais moi-même consciente à chaque fois de ce qu’il se passait, du pourquoi je mangeais et finalement, je l’acceptais au quotidien sachant pertinemment que j’allais réagir à un moment donné.
De même, je ne pense pas avoir souffert de TCA, je ne faisais pas de « crise » de boulimie (même si parfois j’avais besoin de finir la casserole de pâtes…). Je ne me suis jamais faite vomir (même si j’ai dû y songer sans doute adolescente c’est une évidence). Mais bref ce n’était fondamentalement pas envisageable pour moi et j’étais clairement bien loin de ce point.
Concernant mon rapport à la nourriture, il était très ambigu. J’ai grandi dans une famille de bons vivants où être à table est un art de vivre, un moment de retrouvailles, de partage où l’on mange de bonnes choses et où l’on boit du bon vin. On mangeait équilibré même si le week-end on se lâchait un peu plus et chez moi il n’y avait jamais de choses à grignoter (chocolat, bonbons, gâteaux…). Encore aujourd’hui en tant qu’adulte, je ne grignote pas. Non, le vrai problème que j’avais était que je mangeais trop… vraiment trop… On se resserre une fois… voir deux fois et les portions sont bien remplies. Pourquoi ? Je n’en sais rien… Ce n’était pas le cas dans ma famille et j’avais d’ailleurs des petites remarques quand vraiment « ça faisait beaucoup ». Mais c’était souvent bien inconscient… Le besoin de combler, la peur de manquer… Pas sûre qu’un jour j’obtienne toutes les explications mais je crois que ce n’est pas très grave aujourd’hui.
Bon attaquons le vif du sujet : les 3 fois où il a fallu reprendre les choses en mains.
1. Le passage obligé : la diet
La première fois, j’étais au lycée, j’avais pris pas mal de poids du au stress du BAC. C’était une diététicienne qui m’a appris « à manger de manière équilibrée ». La chose positive c’est qu’elle d’adaptait à peu près à mes habitudes alimentaires mais il y avait pas mal de choses à réorganiser. Je crois me souvenir de quelques règles :
- Pas de fromage plus d’une fois dans la journée
- S’il n’y avait pas de légume le midi, il ne devait pas y avoir de féculent le soir
- J’avais le droit de continuer à ne pas déjeuner le matin mais je n’avais le droit qu’à une cannette de coca/ semaine (grosse addiction de ce côté-là).
J’ai perdu une dizaine de kilos, c’était chouette et j’ai bien été soutenue durant cette période. L’avantage c’est que ma famille le faisait avec moi donc pas de risque d’être tentée par l’assiette du voisin.
2. La même et on recommence
C’était en fin de licence, vers 20 ans, après 2 années hyper denses et stressantes à la fac, j’avais repris 10 ou 15 kilos. J’en étais consciente et je l’acceptais car je ne pouvais clairement pas tout gérer en même temps même si j’en souffrais. Alors avec ma maman, on s’est inscrite à weight watcher, seule alternative qui nous semblait la plus équilibrée et sans trop de restriction. J’ai donc attaqué la version « sans compter » pendant 6 mois avec des rendez-vous une fois par semaine. J’ai même réussi à trouver des rdv pendant mes vacances ! J’étais à fond, le peu de restrictions me plaisait, tout était une histoire d’équilibre dans l’assiette mais fondamentalement si on « cheatait » nous n’étions pas jugées et on nous disait de ne pas culpabiliser, l’important c’était de reprendre normalement une fois la spirale terminée. J’ai perdu 13 kilos, une taille de pantalon et j’étais bien dans ma peau.
Avant d’évoquer la troisième partie, un petit topo : les années ont passée, j’ai fini par reprendre 5 – 6 kilos mais c’était plutôt stable. Et puis j’ai grandi, j’ai appris à me connaitre et à prendre soin de moi. J’ai consulté aussi, quand le besoin s’en faisait sentir : hypno, sophro osteo. J’ai relié le corps et l’esprit et donc mieux appréhendé ce rapport à la nourriture, au corps. Et puis je me suis un peu plus engagée, chaque jour avec les valeurs des mouvements de libération de la femme qui ont émergés ces 10 dernières années. Les corps se sont montrés, assumés, révélés ! Et putain ça m’a fait du bien. Ça nous a fait du bien ! Des vrais corps, de toutes les formes et de toutes les couleurs. Une diversité qui a aidé beaucoup de jeune gens comme moi, je crois.
3. Cette fois c’est la bonne
La 3e fois c’était il y a 10 mois que cela à commencé. 2019 était finalement peut-être pire que 2020 et pour cause. Une fin d’un emploi difficile et un nouveau boulot qui ne s’est pas révélé beaucoup mieux, une relation traumatisante avec quelqu’un de toxique, un genou pété, problèmes médicaux, une pilule contraceptive qui me ruine le corps. Bref que du bonheur. J’étais au plus mal émotionnellement, j’ai compensé et je suis montée dans les tours. Et puis le confinement est arrivé.
J’étais dans les meilleures conditions pour le passer mais les angoisses étaient là, la colère aussi. Mais dans ce trou noir, une petite lumière qui s’allume, une force toujours présente pour me dire « Non tu ne vas pas rester comme ça, ça suffit ». Et puis un diagnostic, celui de l’endométriose, pas une surprise mais un moment qui acte un état de fait, celui que je vais peut-être galérer à avoir des enfants. Celui qui va donc entrainer traitements hormonaux sur traitements hormonaux. Et qui dit traitement hormonaux, dit prise de poids et il était hors de question de partir de mon poids actuel. Ajouté à cela un bon gros dégout de soi-même et un genou non opéré. Il était temps d’agir !
J’ai eu la chance, cette fois-ci d’expérimenter une toute nouvelle méthode et surtout de faire ça avec un couple d’amis très proches en qui je donnais toute ma confiance et plus encore. Je leur avais donc parlé quelques mois avant ce mois de mars leur expliquant que j’avais fondamentalement besoin de perdre du poids, pour une question de santé physique et psychologique. Je leurs ai parlé de mes projets et annoncé que j’allais avoir besoin d’eux. Le confinement s’est trouvé être le meilleur moment pour attaquer.
Je crois que cette expérience n’a clairement rien à voir avec tout ce que j’avais déjà essayé et surtout rien n’à voir avec tout ce que vous pouvez lire dans les magazines. Pour commencer, on a tout remis à plat et surtout on a pris le temps de comprendre le fonctionnement de mon corps. J’ai découvert la faim, la satiété, les réactions du corps à ces deux états de fait etc…
J’ai découvert par exemple avoir très faim dès 11h du matin (ne prenant pas de ptit dej), ne plus avoir faim après une seule assiette. De même, je n’arrivais plus à finir un bobun alors que je les dévorai auparavant. Bref j’ai complètement changé mes habitudes, les quantités avalées et tout cela de manière très naturel. On a beaucoup parlé du rapport au corps, des émotions aussi ! Clairement le fait d’être avec des amis a beaucoup aidé. C’était plus naturel, j’ai pu aussi parler de choses plus intimes et ça nous a sans doute beaucoup aidé à avancer.
Je crois que la cerise sur le gâteau c’était cette non pression du poids à atteindre. En effet, l’objectif ici était de se sentir bien dans son corps devant son miroir, d’atteindre le fameux état de body positiv et, à défaut, de body neutralité. Ce fut un réel soulagement… Cette balance, objet de toutes mes angoisses, obsession toxique et néfaste pour le moral, pouvait tranquillement prendre la poussière sous mon meuble. ET CA C’EST UNE SACREE LIBERATION !
10 mois après, où est-ce que j’en suis ?
Avant tout, je vais beaucoup mieux psychologiquement, j’ai un nouveau boulot qui me plait, un nouvel appartement et je me suis faite soigner sous hypnose. Je pense que c’est tout aussi essentiel dans une démarche de perte de poids, du moins, pour moi. Si tu vas bien dans ta vie tu es naturellement plus positif et bienveillant avec toi-même et donc plus apte à prendre soin de toi.
Aujourd’hui, je me sens mieux dans mon corps, je me sens plus « affinée », mes jeans sont trop grands et ce n’est pas la peine de me demander combien de kilos j’ai perdu, je n’en sais rien et à vrai dire, je m’en contre fiche. Je me sens belle, pas tous les jours c’est sûr, mais je ne me dégoute plus.
J’aime bien ce corps, il n’est pas parfait mais c’est le mien et il est plutôt chouette.
Côté nourriture, je mange clairement moins qu’avant et je prends toujours autant de plaisir à cuisiner ce dont j’ai envie. Bon des fois je loupe le coche du rassasiement et je mange trop, ça arrive parfois consciemment et parfois non. On en a discuté et ce n’est pas bien grave en vrai. J’ai appris à jeter aussi, où à ne pas finir mon assiette et ça c’est clairement une petite victoire même si je ne sais pas bien des fois si je laisse pour me dire que je n’ai pas tout mangé ou parce que je n’avais plus faim mais en vrai, who care?
Il y a encore du boulot c’est sûr, mais je crois que je suis aujourd’hui sur la bonne voie. Le fait de ne plus réfléchir en mangeant c’est le prochain objectif mais j’ai toute la vie pour y arriver.
INFINIMENT MERCI «